« L’ennemi ne frappe plus seulement avec des armes, il s’installe dans nos villages, infiltre nos réseaux, manipule nos communautés. En Ituri, notamment dans le territoire d’Irumu, la menace que fait peser le groupe ADF/ISCAP dépasse désormais les massacres visibles : c’est une guerre souterraine, psychologique et profondément enracinée, qui se déroule à huis clos. »

Voilà l’alerte lancée cette semaine par African Security Analysis (ASA), à la suite des tueries de masse enregistrées à Bwanasula, Mayalibo, Kisamaibo et Otmaber, où plus de trente civils ont été exécutés avec une violence inouïe.

Au-delà de l’horreur, ASA met en lumière une tactique d’infiltration progressive et méthodique, devenue l’arme principale du groupe terroriste affilié à l’État islamique.

L’infiltration, une stratégie qui tue dans le silence

Selon ASA, les ADF/ISCAP ne se contentent plus d’attaquer, ils s’infiltrent : dans les villages, dans les marchés, dans certaines structures militaires locales. Ils observent, écoutent, recrutent, sabotent.

Leur présence n’est pas toujours visible, mais elle est constante. Par cette stratégie, ils arrivent à collecter des informations sensibles sur les mouvements de troupes, saboter discrètement les opérations de l’armée congolaise et de l’UPDF, instaurer un climat de peur et de méfiance entre les populations et les forces de l’ordre, et surtout manipuler des jeunes vulnérables pour les enrôler ou corrompre certains maillons faibles du système.

C’est cette guerre de l’ombre, cette présence rampante, qui rend la situation actuelle si alarmante.

Des opérations militaires qui ne suffisent plus

En dépit de la coopération militaire FARDC–UPDF, la réactivité des insurgés reste redoutable. ASA note que les ADF/ISCAP semblent toujours avoir un coup d’avance, changeant rapidement de zone, anticipant les mouvements des troupes, frappant des villages faiblement protégés, puis disparaissant dans la forêt.

C’est la preuve, selon ASA, que la lutte actuelle est incomplète et inadaptée, tant qu’elle repose uniquement sur une réponse militaire.

« Il faut changer de paradigme, adopter une stratégie intelligente, préventive et ancrée dans les communautés », recommande African Security Analysis qui préconise également le renforcement du renseignement communautaire et spécialisé, la surveillance des réseaux suspects afin d’anticiper les attaques à partir de données fiables, et la protection efficace des populations civiles exposées avec la création des brigades de réaction rapide pour intervenir sur la base des alertes communautaires et empêcher les massacres.

« Il faut que les forces de sécurité retrouvent la confiance du peuple. Cela passe par des dialogues francs, des mécanismes de dénonciation sûrs, des chefs locaux impliqués dans la stratégie de sécurité. Sans cela, les ADF continueront à manipuler et diviser », ajoute ASA qui estime qu’il est impératif que l’État, les médias locaux et les leaders sociaux mènent une contre-campagne forte, pour restaurer l’espoir, l’unité et la résilience face celle menée par les ADF à travers des vidéos, des menaces ciblées pour installer la peur dans le chef de la population civile.

Cette structure recommande également, la sortie de la seule logique militaire : « Il est temps de comprendre que cette guerre ne se joue pas seulement avec des armes. Elle se joue dans les écoles, les églises, les radios, les rues, là où les cœurs et les esprits sont influencés. Une approche sécuritaire globale, mêlant développement, cohésion sociale et justice, est indispensable », poursuit-elle.

Un cri d’alarme et un appel à l’action

ASA ne lance pas seulement une analyse ; elle interpelle et appelle les autorités congolaises, les partenaires régionaux et les organisations internationales à ne plus gérer cette crise à moitié.

« La RDC ne peut pas vaincre l’ADF/ISCAP si elle ne comprend pas sa guerre. Ce n’est pas une guerre de territoire. C’est une guerre de patience, d’influence et de terreur silencieuse. Et elle est en train d’être gagnée par l’ennemi », conclut ASA qui réitère la nécessité de ne pas ignorer les dimensions sociales, psychologiques et communautaires de cette guerre faute de quoi, « les massacres continueront, les infiltrations s’intensifieront et l’espoir reculera. »




Joseph Seven

Joseph Seven - 21/07/2025 10:09 - Répondre 

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