À l’occasion du 15 anniversaire de la publication du Rapport Mapping du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), le prix Nobel de la Paix Denis Mukwege a publié une longue déclaration sur son compte X dans laquelle il déplore l’inaction des autorités congolaises et de la communauté internationale face aux crimes graves commis en République démocratique du Congo (RDC) entre 1993 et 2003.

Publié le 1er octobre 2010, le Rapport Mapping documentait 617 incidents violents susceptibles de constituer des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité et, dans certains cas, des actes assimilables à un génocide.

Ces crimes ont été attribués à différentes parties prenantes des conflits qui ont ravagé la RDC, avec une implication de pays voisins, notamment le Rwanda et l’Ouganda. 

Le Dr Mukwege rappelle que, 15 ans après, aucune initiative sérieuse n’a été menée pour traduire les responsables en justice ou mettre en œuvre les recommandations du rapport.

Il dénonce la persistance de l’impunité, aggravée par la présence de seigneurs de guerre intégrés dans les institutions ou les forces de sécurité.

Il critique également la gestion des mécanismes de réparation, évoquant des allégations de corruption au sein du Fonds national de réparation des victimes de violences sexuelles et des crimes de guerre (FONAREV) et du Fonds spécial de réparation et d’indemnisation (FRIVAO), censés exécuter l’arrêt de la CIJ de 2022 contre l’Ouganda. 

Mukwege appelle la Cour pénale internationale (CPI) à poursuivre ses enquêtes en RDC et exhorte les États à recourir au principe de compétence universelle, citant l’exemple de la procédure contre Roger Lumbala en France.

Il plaide également pour la création d’un Tribunal pénal spécial pour la RDC et de chambres spécialisées mixtes afin de juger les auteurs et commanditaires de crimes imprescriptibles.

« On ne construira pas la paix sur des mensonges et la mauvaise foi », soutient-il, expliquant que seule une justice indépendante et impartiale pourra briser le cycle de violence et d’impunité. 

Le prix Nobel de la Paix insiste par ailleurs sur la nécessité de rendre publique la base de données du HCDH répertoriant les auteurs présumés des crimes documentés.

Il estime qu’une politique nationale de justice transitionnelle comprenant vérité, justice, réparations et réformes institutionnelles est indispensable pour parvenir à une paix durable en RDC et dans la région des Grands Lacs.