Le président sud-africain Cyril Ramaphosa aurait mis en garde son homologue congolais Félix Tshisekedi contre toute exécution de l’ancien président Joseph Kabila, estimant qu’une telle décision pourrait déclencher un coup d’État violent en République démocratique du Congo.

C’est ce que révèle le journal sud-africain Sunday Times dans son édition du 19 octobre 2025.

Selon plusieurs sources proches du gouvernement sud-africain, le chef de l’État a transmis cet avertissement à Tshisekedi lors de sa visite à Pretoria le mois dernier.

Cette rencontre s’inscrivait dans le cadre d’efforts de médiation initiés par l’Afrique du Sud pour tenter d’apaiser les tensions entre les deux anciens dirigeants congolais, aujourd’hui en conflit ouvert.

Deux semaines plus tard, Joseph Kabila était condamné à mort par contumace pour crimes de guerre et trahison par un tribunal militaire congolais, une décision qui a suscité de vives inquiétudes dans la région.

D’après les informations du Sunday Times, l’Afrique du Sud, appuyée par le Zimbabwe, chercherait désormais à obtenir une issue politique à la crise autour de Kabila.

Le président zimbabwéen Emmerson Mnangagwa aurait été le premier à solliciter l’intervention de Ramaphosa, inquiet d’une possible déstabilisation régionale.

La porte-parole du gouvernement sud-africain, Khumbudzo Ntshavheni, a confirmé que Pretoria s’était engagée à poursuivre la coordination des efforts de paix dans l’est de la RDC : « Le président Ramaphosa a déjà rencontré l’ancien président Kabila et il rencontrera prochainement le président Tshisekedi. D’autres échanges sont prévus avec d’autres acteurs, y compris le mouvement M23, afin de favoriser un dialogue global », a-t-elle indiqué.

Un haut responsable sud-africain, cité par le Sunday Times, estime que les accusations contre Kabila sont « politiquement motivées ».

« C’est une caractéristique typiquement africaine : les présidents contrôlent souvent les tribunaux et mènent leurs batailles politiques à travers eux. Le problème de Tshisekedi, c’est que Kabila reste plus populaire que lui », a-t-il ajouté.

Selon ces sources, Pretoria craint que la condamnation à mort de Kabila ne renforce la fracture politique au sein du pays et ne compromette davantage les efforts de paix dans l’est de la RDC, où les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda, contrôlent encore plusieurs entités.

Joseph Kabila, qui a dirigé la RDC pendant plus de deux décennies avant de céder le pouvoir en 2019, vit entre l’Afrique du Sud et le Zimbabwe depuis 2023.

Il avait annoncé son intention de « contribuer à la paix » dans l’Est du pays en avril dernier.

Peu après cette annonce, son parti politique avait été interdit et ses biens gelés par le gouvernement congolais.

Condamné en juillet dernier pour trahison, il est accusé d’avoir soutenu le M23 dans sa récente offensive contre l’armée congolaise.

Pour Pretoria, écarter brutalement Kabila du paysage politique congolais pourrait s’avérer contre-productif : « Kabila devrait faire partie de la solution, pas du problème », confie une source diplomatique sud-africaine au Sunday Times.

Les autorités sud-africaines plaident ainsi pour un dialogue inclusif entre le gouvernement congolais, l’opposition et les groupes armés.

Des discussions seraient en préparation, sous l’égide conjointe de l’Afrique du Sud et du Zimbabwe.

Jusqu’ici, les autorités congolaises n’ont pas officiellement réagi à ces informations.

La présidence sud-africaine, de son côté, a refusé de commenter les détails des échanges entre Ramaphosa et Tshisekedi.

Mais pour de nombreux observateurs, cette médiation illustre la crainte grandissante d’une déstabilisation régionale si le bras de fer entre Tshisekedi et Kabila devait s’envenimer.