La ville de Goma, malgré les lourds défis imposés par la guerre et l’instabilité, retrouve petit à petit son sourire à travers la résilience de ses habitants, en particulier les artistes. Entre le football, la boxe, les concerts et les festivals, les activités culturelles continuent de redonner vie à cette ville meurtrie. Cependant, la situation n’est pas sans obstacles. Depuis la déclaration de l’état de siège le 1 mai 2021 par le président Félix Tshisekedi dans un ordonnance et la mise en place de mesures de sécurité drastiques, notamment des couvre-feux, la tenue de grands événements culturels a été mise à mal depuis lors.

L’Annulation du Festival Amani et des Concerts en 2024.

Le Festival Amani, événement phare de la région des Grands Lacs, devait se tenir du 15 au 17 novembre 2024. Cependant, à la grande déception des festivaliers, l’événement a été annulé pour la deuxième fois par le maire de Goma, le Commissaire Supérieur Principal Faustin Kapend Kamand. Dans un communiqué daté du 12 novembre, ce dernier a expliqué que la ville n'avait pas été informée de l’organisation de ce festival, un autre coup dur pour les amateurs de musique et de culture.

La frustration des fans a été exacerbée par l’annulation, à la dernière minute, du concert public de Fally Ipupa, prévu pour le 16 août 2024. L’événement, qui aurait dû réunir des milliers de personnes à Goma, a été annulé en raison de problèmes de sécurité liés à l’état de siège. L’incident a provoqué des échauffourées parmi la foule, et la frustration s’est encore intensifiée lorsque le concert a été déplacé en format VIP, excluant une grande partie du public.

L’Espoir Renouvelé avec le Festival Feski

1èr édition dans ce contexte difficile marqué par la guerre, un petit rayon de lumière est apparu avec l’organisation du Feski, un festival social du Kivu, porté par un particulier sans aucun sponsor officiel. Bien que les premiers jours aient montré une participation timide des Gomatraciens, la troisième journée a été marquée par une effervescence inédite. Le public s’est laissé emporter par des artistes locaux tels que Capita AMON et Mack El Sambo, qui ont mis le feu aux planches avec des performances de reggae et d’amapiano, des styles musicaux populaires en ce moment. La soirée à la plage publique de Goma a été un moment de pure magie, offrant aux spectateurs un répit bien mérité dans une période de grande incertitude.

Pour Alex Kambale, animateur culturel très suivi dans la ville, c’était un véritable "ouf de soulagement" de voir le retour timide mais tangible de la culture sur scène. "Ce sont les artistes qui sont perdants si rien n'est fait pour organiser ce genre d'activités", a-t-il commenté, soulignant le rôle crucial de la culture pour l'unité et la résilience d'une communauté en crise.

En dépit du contexte politique tendu, le maire de la ville de Goma, Katembo Julien, membre du mouvement M23, a pris la parole durant l'événement. Il a appelé la jeunesse à éviter les discours de haine et à cultiver l’amour. Sangara, chargé de la culture et des arts, a également promis d'amener d'autres artistes en réponse aux attentes de la population. Des noms tels que Gazo, Fally Ipupa, Gims et Youssoupha ont été mentionnés par le public, soulignant l’engouement pour la musique et la culture.

Un chant en Swahili a été entonné par le responsable du recrutement et de la mobilisation du mouvement : "Congo ita jengwa na sisi vijana" (La RDC sera construite par nous les jeunes). Bien que le maire ait précisé que cet événement n’avait pas de dimension politique, il est évident que la jeunesse de Goma, et de toute la région, s’approprie la culture comme un moyen de résister à la crise.

Malgré les horreurs de la guerre et la situation précaire dans laquelle se trouve le pays, Goma continue de se positionner comme la capitale culturelle de la République Démocratique du Congo. La jeunesse, encore et toujours, fait preuve de résilience. Ce festival Feski, bien que modeste en comparaison des grands événements d'antan, incarne cette volonté indomptable de maintenir la flamme de la culture vivante, dans l’espoir de voir un jour la paix restaurée.

Des jeunes venus d’autres villes voisines ont également répondu présents, faisant de cet événement une véritable fête de la solidarité et de la culture. La ville de Goma, avec son esprit indestructible, attend désormais la paix totale pour reprendre pleinement son souffle culturel et social.