
Dans l’Est de la République démocratique du Congo, là où les conflits ont laissé des cicatrices profondes, une salle de cinéma s’élève comme un refuge. Pas de tapis rouge ni de sièges en velours. Ici, le 7e art s’écrit sur les visages, dans les silences partagés, les regards mouillés. À Goma, ville résiliente, un homme transforme les projections en moments de guérison. Son nom : Td-Jack Muhindo.
Un écran, une communauté
Tout a commencé par une idée simple : et si le cinéma pouvait être plus qu’un divertissement ? Dans un quartier populaire de Goma, Td-Jack, réalisateur et passionné de médias, a ouvert un espace de projection où l’on vient non seulement pour voir des films, mais pour se retrouver, s’écouter, se soigner.
Chaque semaine, plusieurs centaines de personnes s’y rendent. Les films choisis ne sont pas anodins. Ils parlent de guerre, de perte, d’exil, mais aussi de résistance, de solidarité, d’espoir. Des récits ancrés dans le vécu des habitants, qui permettent à chacun de se reconnaître, de réfléchir, et parfois… de pleurer.
Ce qui distingue ce lieu d’un cinéma ordinaire, c’est ce qui se passe après le générique. Quand la lumière revient, elle n’éteint pas la magie. Au contraire, elle l’amplifie. Les spectateurs ne partent pas tout de suite. Ils restent, débattent, questionnent, partagent leur vécu. Des inconnus deviennent des confidents. Le cinéma devient agora.
« Ici, les gens n’ont pas l’habitude de parler de leurs douleurs », explique Td-Jack.
« Le film ouvre une porte. Et cette parole qui se libère, c’est le début de la guérison. »
Un art qui reconstruit
Dans une région où les infrastructures culturelles manquent cruellement et où la santé mentale reste un tabou, cette initiative tient presque du miracle. Mais un miracle bien concret, porté par une volonté inébranlable. Le projet ne bénéficie d’aucune grande subvention. Il repose sur des moyens modestes, sur la débrouille, mais surtout sur la foi en la puissance de l’art.
À côté de la salle, une vendeuse de maïs grillé observe la scène. Elle n’a pas besoin d’écran pour comprendre que ce qui se joue ici est essentiel. Les visages se détendent, les épaules se relâchent. C’est le cinéma comme on le voit rarement : non pas consommé, mais vécu.
Une lumière dans l’obscurité
À Goma, la vie continue malgré l’insécurité, malgré les déplacements de population, malgré les drames. Et dans ce petit espace de projection, un autre récit s’écrit : celui d’une population qui refuse de céder à la fatalité.
Grâce à des artistes comme Td-Jack Muhindo, le cinéma devient bien plus qu’un art. Il devient une langue, une main tendue, une lueur.
Parce qu’au fond, si le cinéma peut faire rêver, il peut aussi, parfois, recoller les morceaux d’un cœur brisé.
Avec Journaliste24
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