Il est reproché à l’armée congolaise son manque de professionnalisme, son incapacité à combattre les groupes armés qui pullulent notamment à l’Est de la République Démocratique du Congo, ses violations récurrentes des droits de l’homme et du droit international humanitaire et plein d’autres choses. Toutes ces faiblesses ont induit son incapacité à défendre le territoire national, surtout en ces moments ou le pays a est encore une fois agressé par le Rwanda avec la complicité des Etats occidentaux et des multinationales qui profitent du chaos engendré par ces agressions. 

La plupart des réformes initiées par les casques bleus et l’Union européenne en RD Congo étaient superficielles en ceci qu’elles ne s’attaquaient qu’aux questions des droits de l’homme sans chercher ses causes structurelles, lesquelles causes sont entre autres la faible capacité opérationnelle de l’armée congolaise,  la non maitrise des effectifs des militaires, l’absence d’une politique d’acquisition des matériels le non-paiement des salaires des militaires, l’absence de garnison, le manque d’infrastructures (bureaux) le manque des matériels de guerre, les mixages de l’armée imposée par la communauté internationale après chaque agression de la RDC par le Rwanda etc. Tout ce défis d’ordre opérationnel, administratif, logistique et social ont contribué à fragiliser l’armée faisant de la RD Congo la proie de ses voisins. 

Par ailleurs, les agressions que le pays subies depuis bientôt 30 ans, ne lui laissent ni le temps ni les ressources suffisantes pour se reformer et se moderniser. 

Pour les organisations humanitaires impliquées dans la Réforme du Secteur de la Sécurité (R.S.S) en RD Congo, la réforme n’a consisté qu’à élaborer et à former les militaires sur les contenus approximatifs des manuels sur les droits de l’homme, le Droit International Humanitaire et sur les violences sexuelles. Ces initiatives bien que louables et de nature à protéger les civils étaient insuffisantes. 
L’arrivée du Général Kabanda a modifié cette façon de faire. Grâce à sa bonne connaissance de l’armée congolaise, de son histoire et de ses problèmes majeurs, le Général a initié des réformes importantes qui visaient à réellement professionnaliser l’armée congolaise. Il a par ailleurs donné vie aux réformes commencées par ses prédécesseurs notamment les anciens ministres Atama Tabe ou Mukena Aimé Ngoy Mukena.

Malheureusement, les espoirs et la confiance qui commençaient à renaitre au sein de nos forces armées et de la population ont été anéantis par l’ordonnance lue ce jeudi 23 mars 2023 relative au remaniement du gouvernement. 
Il s’agit du remplacement prématuré du Général Kabanda par Monsieur Jean Pierre Bemba, ancien chef rebelle du Mouvement de Libération du Congo et ancien vice-président de la RDC nommé Vice-Ministre au temps de 1+4. 

Le discours prononcé par le Général Kabanda lors de la cérémonie de remise et reprise a mis en évidence, les réformes structurelles importantes initiées au cours de ses 23 mois à la tête du Ministère de la Défense. Elles avaient pour objectifs les capacités de défense du territoire national, d’améliorer les conditions de vie des militaires tout en assurant la protection des civils et de leurs biens. Ces réformes sont entre autres la dotation de la RDC d’une politique nationale de défense, l’élaboration d’une loi de programmation militaire promulguée en 22 aout 2022, la remise en service de la Cellule d’Audit et de contrôle financier du ministère de la défense, la signature des accords de coopération militaire notamment avec la Turquie, l’Egypte, le Tanzanie, le Burundi, les Emirats Arabes Unis et d’autres Etats, la signature de deux arrêts de réorganisation de la diplomatie militaire, l’acquisition et la remise en état des matériels de guerre dont les fameux avions Sukoi de la Force aérienne, l’achat des jeeps, des armes et des munitions, l’acquisition d’un budget d’investissement d’environ un milliard de dollars dans la loi des finances de 2023. 

Bref, les actions initiées par le Ministre Kabanda montrent bien qu’il connaissait l’armée dont il est retraité. Et il s’attelait à relever un à un les défis auxquels font face les FARDC afin de doter le pays d’une armée forte, dissuasive et capable de défendre l’intégrité du territoire national et la souveraineté de la République Démocratique du Congo. Monsieur Kabanda a placé la barre très haut.

On a encore une fois la triste impression qu’avec ce remaniement, la République Démocratique du Congo a confondu vitesse et précipitation. En effet, l’avancée rapide de l’armée rwandaise sur le territoire congolais et l’approche imminente des élections imposent au régime de rechercher des résultats rapides à proposer à la population congolaise et à l’opinion internationale.  L’espoir pour obtenir ces résultats est désormais placé dans la fougue de Monsieur Jean Pierre Bemba. Celui-ci doit être en mesure de récupérer dans moins de 9 mois les localités occupées par le Rwanda et les forces de l’EAC. Sans compter les batailles contre les ADF/NALU à Beni, les différentes milices de l’Ituri, du Sud Kivu et du Maniema. 

Ces victoires tant attendues ne seront pas possibles si l’actuel Ministre de la Défense nationale ne poursuit pas les réformes structurelles initiées par ses prédécesseurs. Il lui faudra continuer à renforcer notre gouvernance sécuritaire. Non seulement avec des actions « feu de pailles » mais des actions à impact durable. Il devra appliquer les textes légaux et réglementaires produits en 2022 ainsi que le code d’éthiques et de déontologie des militaires. Il faudra, en toute intégrité et transparence, continuer à doter les militaires des tenues et des équipements modernes. Il faudra continuer à recruter, à former les militaires sur les nouvelles techniques et stratégies de guerre, il faudra maitriser les effectifs et poursuivre la paie des soldes des militaires, à mettre en place des structures de santé viables pour les militaires et leurs familles, à aménager des camps pour héberger de façon décente les militaires et leurs familles, prendre en charge les blessés de guerre, les veuves et les orphelins militaires etc. Tout cela participe au renforcement et à la professionnalisation de l’armée congolaise. 
Les victoires tant souhaitées des FARDC en dépendent. Il ne s’agit donc pas de foncer tête baissée pour combattre une armée aussi aguerrie, perfide et bien équipée qu’est l’armée rwandaise. Ce serait envoyer les militaires à l’abattoir. Le Vice Premier Ministre et Ministre Jean Pierre Bemba doit user de modération et d’intelligence pour arriver à bout de l’ennemi. 
Les congolais et le Président de la République ont placé en lui leurs espoirs. La RD Congo doit absolument gagner cette guerre qui doit être la dernière. Le VPM n’a pas droit à l’erreur, mieux à l’échec. Surtout que la RDC a mis à sa disposition des moyens conséquents. Il a un milliard des dollars dans la loi des finances 2023. Tous nos yeux sont rivés sur lui. 

Par Bugandwa Zigabe Innocent, penseur libre.